MARJEANE

ÉCRITURES TEXTILES

OURDIR

Ourdir
Au sens premier
Avec les fils, l’ourdissoir, les mains
Et le cahier compagnon ouvert sur les notes brèves qui font dessin
Commencer
Entrer dans l’histoire, toucher les fils, flotter un temps sur les couleurs, la palette riche, les contraires, la nuance et le vif.
J’aime l’élan gourmand de mon geste vers le choix d’un chemin –
Ondes bleues ou volutes rouges – Terre blanche parsemée de touches sombres ou matin gris traversé de farandoles roses – Vert vif qui voudrait les sommets – Orange pour le rappel à la joie, cœur tranquille

Ce matin sera bleu

Ma main en caresse des laines douces, des tulles rugueux et légers, des cotons vifs, presque tranchants, des lins bruts, des fils fantaisie au toucher en grelots. Matières au contact de la souplesse infinie à la tension immédiate.

Ma main en prise directe avec les bleus, Klein, Majorelle, pétrole, marine ou turquoise, roi et ciel, ouvertures claires et bois profonds, indigo des ailleurs.
Ailleurs…

Ourdir
Non pas des complots
D’autres s’en occupent tellement bien
                tellement précisément
                tellement chirurgicalement
Fomenter pour détruire et encore et encore et encore et encore et encore et
Rien dans mon geste qui échafauderait pour blesser, atteindre la cible
D’autres s’en occupent, me tenir loin

J’ourdis
Au sens premier du geste
Je prends ma place dans la belle famille de celles et ceux qui mêlent leurs mains aux fils.
J’inventer l’échappée sauvage et libre, férocement joyeuse s’il le faut,
J’ourdis encore
        Je tisse et je sème.